La Société générale pourrait supprimer 20 % de ses agences d’ici à 2020

Voilà sans doute le début d’un mouvement de fond dans la banque : comme l’ont révélé Les Echos mardi 29 septembre, citant des sources syndicales, la Société générale prévoit de fermer environ 400 de ses 2 221 agences d’ici à 2020, soit jusqu’à 20 % de son réseau. Et ce pour s’adapter à la chute de fréquentation des agences bancaires et au boom du numérique. Désormais, moins d’un client sur deux se rend en agence au moins une fois par mois.

Ce projet, qui sera officiellement dévoilé, et précisé, par la banque française avant le mois de décembre, devrait s’effectuer sans licenciement, confirment au Monde des sources proches de la banque. Selon le syndicat FO, la direction compte sur « le non-remplacement » de 3 000 départs en retraite pour réaliser cette restructuration. Les représentants syndicaux redoutent cependant des mutations forcées.

Le plan conçu par la Société générale vient confirmer les prévisions des experts du secteur bancaire, qui annoncent, depuis déjà deux ans, une grande vague de fermetures d’agences bancaires en France. Le territoire français dispose en effet d’un maillage serré d’agences – il en existe un peu plus de 37 000 aujourd’hui – qui ne correspondrait plus aux nouveaux usages des clients. Ceux-ci déserteraient les guichets bancaires pour privilégier les services de banque en ligne, par téléphone ou sur le Web.

« Anticiper les ruptures de demain »

La Société générale fait pour sa part valoir, depuis plusieurs semaines, que la part des clients déclarant se rendre en agence au moins une fois par mois n’est plus que de 42 % en 2015, quand elle s’établissait encore à 57 % en 2007. Le reste du secteur est à l’avenant. Et les fermetures d’agences, encore limitées en nombre et effectuées dans une relative discrétion, sont devenues quotidiennes…

Pour l’état-major de la Société générale – qui se refuse à confirmer « pour l’instant » le chiffre précis de fermeture d’agences –, une telle accélération de la modification des usages pousse donc à réagir et à accélérer la transformation de son réseau. La banque, qui avait déjà commencé depuis plusieurs années à réduire ses implantations au rythme d’une dizaine par an, envisageait de fermer 40 agences cette année. Elle entend passer à la vitesse supérieure, afin d’« anticiper les ruptures de demain ».

Dans un message diffusé à la presse, mardi 29 septembre, le groupe explique vouloir « accélérer la transformation du modèle relationnel de la banque de détail en France ». Ce qui implique d’« accélérer le rythme d’optimisation du réseau d’agences pour s’adapter à l’évolution rapide du comportement des clients ».

« Il faut anticiper, confirme un proche de la direction, à la Société générale comme dans l’ensemble du secteur bancaire, ces évolutions fondamentales vont entraîner une érosion structurelle des besoins d’emplois dans les réseaux. »

« La présentation du plan détaillé du déploiement de notre nouveau modèle relationnel à l’horizon 2020, avec les informations sur l’adaptation de notre dispositif d’agences, est prévue avant la fin de l’année », précise la Société générale. Les fermetures d’agences devraient surtout se concentrer en milieu urbain et aboutir à des agences plus grandes et modernisées, avec beaucoup de « technologies embarquées » (ordinateurs, tablettes, etc.).

« Diversifier les formats d’agences »

De fait, au-delà de la réduction du nombre d’agences, c’est le service aux clients qui doit être repensé, estiment les banques. « Nous voulons faire évoluer et diversifier les formats d’agences », explique-t-on à la Société générale.

Concrètement, dans les zones urbaines, trois grands types d’implantation coexisteront, en fonction des besoins locaux des clients : de grandes agences conçues comme « des pôles d’expertise », regroupant des conseillers généralistes et des conseillers spécialistes (par exemple pour la clientèle d’entreprises) ; des agences avec uniquement des conseillers généralistes, qui pourront recourir à l’expertise des grandes agences ; enfin des espaces libre-service automatisés. Un large programme de digitalisation des agences est prévu.

In fine, selon la banque, ce plan de réduction d’agences aurait donc davantage à voir avec la modernisation de son modèle et la volonté d’améliorer le service aux clients, qu’avec la nécessité de réaliser des économies.

Pour les syndicats, un « plan scandaleux »

La banque dissocie ainsi ce projet de son plan de réduction de dépenses annoncé en août, et qui prévoit 850 millions d’euros d’économies d’ici à 2017, grâce à des suppressions de postes (environ 420 sur plus de 148 000) et à la réorganisation de son siège à Paris et au regroupement de fonctions dans la banque de financement et d’investissement.

Conscients de la nécessité d’opérer un saut technologique, les syndicats bancaires en redoutent toutefois l’effet sur l’emploi bancaire. L’ensemble des « caisses espèces » sont vouées à disparaître dans les cinq ans, a ainsi indiqué à l’AFP Sébastien Busiris, de la fédération FO-banques, qui a commencé d’alerter les salariés de la banque.

Le syndicat dénonce « un plan drastique, scandaleux et profondément choquant », estimant que « rien ne justifie ces fermetures d’agences ». La décision d’accélérer la fermeture des agences a été faite aux représentants du personnel en fin de semaine dernière, lors d’une présentation du « plan 2015-2020 ».

Selon FO, plusieurs milliers de postes sont potentiellement concernés par ce projet car, explique-t-on, « les salariés partant en retraite ne seront pas spécialement dans les agences concernées par le plan », souligne M. Busiris.

Estimant que d’« autres banques » devraient faire des annonces semblables, les syndicats de la Société générale appellent à l’organisation rapide d’un grand « débat sur la banque de demain »